L’avènement du numérique dans le panorama éducatif dessine un futur empli de potentialités, mais également d’interrogations qu’il nous faut, avec lucidité, adresser. Les outils numériques, dont la portée s’élargit jour après jour, ont déjà démontré leur capacité à accentuer les clivages, aussi bien intra-nationaux qu’internationaux. L’intelligence artificielle, avec son cortège de promesses d’automatisation, pourrait bien révolutionner le marché du travail. Cependant, cette même IA, que nous envisageons comme un vecteur de progrès, porte en elle le risque de creuser davantage les inégalités, en avantageant les plus favorisés.
Réduire les inégalités
Face à cette situation, notre responsabilité est d’inscrire toute innovation technologique dans un schéma visant à réduire les inégalités, à commencer par celles qui affectent le monde de l’éducation. Il est impératif de questionner toute introduction de l’IA générative dans nos systèmes éducatifs : contribue-t-elle à combler le fossé des inégalités éducatives ou risque-t-elle de l’élargir ? Si la réponse n’est pas satisfaisante, il convient de repenser les stratégies et les calendriers.
Il est également de notre devoir de veiller à ce que la puissance de l’IA générative, en s’ajoutant aux outils numériques existants, ne vienne pas éroder l’autorité et la prééminence du corps enseignant, qui est pourtant appelé à s’investir encore davantage. Il serait d’une naïveté confondante de ne pas anticiper que l’évolution de l’IA renforcera la tentation d’une automatisation croissante de l’enseignement, promettant des scénarios dystopiques où les établissements et les formateurs seraient rendus obsolètes.
Renforcer le capital humain
Certains pourraient être tentés de voir dans l’IA générative la panacée pour les défis éducatifs des régions les plus en difficulté. Or, la réponse à ces défis est moins dans la technologie de pointe que dans la valorisation et le renforcement de notre capital humain : des écoles bien administrées, des enseignants en nombre suffisant, correctement formés et rémunérés.
En outre, nous sommes à la croisée des chemins en matière d’investissement. Quelle part de nos efforts et de nos ressources financières devons-nous allouer au développement des machines par rapport à celui de l’humain ? La balance penche-t-elle trop vers la formation des machines aux dépens de l’éducation des citoyens de demain ? En dépit de l’attrait des avancées technologiques, n’oublions pas que l’éducation de l’homme reste primordiale, et ce même dans un contexte où plus de 700 millions d’individus sont privés de la capacité élémentaire de lire et d’écrire.
À l’aune de cette nouvelle ère de l’IA, nous devons réaffirmer notre engagement indéfectible en faveur d’une éducation qui valorise les enseignants, qui mise sur le développement des compétences humaines et qui garantit un accès équitable au savoir pour tous. C’est dans cette optique que nous devons orienter nos politiques et nos investissements, en gardant fermement à l’esprit que le cœur de toute éducation, c’est avant tout le développement de l’esprit critique et analytique.