Intelligence Artificielle fabriquée en Europe

20 Millards par an pour le déploiement d’une IA « fabriquée en Europe »

Dans un communiqué de presse publié le 7 décembre 2018, et dont voici les éléments essentiels, la Commission Européenne et les états membres, indiquent vouloir collaborer pour stimuler l’intelligence Artificielle “fabriquée en Europe”.

Fin 2018, la Commission a présenté un plan coordonné élaboré avec les États membres pour favoriser le développement et l’utilisation de l’IA en Europe.

Ce plan propose des actions communes pour une coopération plus étroite et plus efficace entre les États membres, la Norvège, la Suisse et la Commission européenne dans quatre domaines d’action essentiels:

  • accroître les investissements,
  • rendre davantage de données disponibles,
  • cultiver les talents et garantir la confiance.
  • Une coordination plus étroite est indispensable pour faire de l’Europe un acteur régional de premier plan en vue du développement et du déploiement d’une IA éthique, sûre et de pointe.

Andrus Ansip, vice-président pour le marché unique numérique , s’est félicité de cette étape importante. L’objectif est de dégager au moins 20 milliards d’euros d’investissements privés et publics d’ici à la fin de 2020, notamment pour la mise en commun de données médicales pour améliorer notamment le traitement du cancer et les diagnostics.

Mariya Gabriel, commissaire pour l’économie et la société numériques,  a souligné que l’IA transforme le monde. Son deployment est indispensable en Europe dans un cadre qui permet de préserver la confiance et dans le respect des valeurs éthiques.

La Commission donne priorité aux domaines de la santé, du transport, de la mobilité, de la sécurité et de l’énergie.

20 milliards d’euros d’investissements publics et privés seront consacrés à la recherche et l’innovation dans le domaine de l’IA d’ici à la fin de 2020. Pendant toute la décennie qui va suivre, 20 milliards d’euros seront investis tous les ans sur le développement de l’Intelligence Artificielle dans les pays de l’Union.

Une IA éthique et digne de confiance

La Commission Européenne met l’accent sur le développement d’une Intelligence Artificielle éthique et digne de confiance.

Dans son communiqué de presse du 7 décembre 2018, la Commission Européenne precise :

“L’IA soulève de nouvelles questions éthiques, telles que la partialité dans la prise de décisions. Pour susciter la confiance, qui est nécessaire pour que les sociétés acceptent et utilisent l’IA, le plan coordonné doit permettre de développer une technologie respectueuse des droits fondamentaux et des règles éthiques. Un groupe européen d’experts, composé de représentants des milieux universitaires, des entreprises et de la société civile, travaille actuellement sur des lignes directrices éthiques pour le développement et l’utilisation de l’IA. Une première version sera publiée d’ici à la fin de 2018 et les experts présenteront leur version finale à la Commission en mars 2019 au terme d’une consultation élargie dans le cadre de l’Alliance européenne pour l’IA. L’ambition est, ensuite, de porter l’approche éthique de l’Europe sur la scène mondiale. La Commission va ouvrir la coopération à l’ensemble des pays tiers désireux de partager des valeurs communes”.

Contexte

L’Union Européenne travaillera sur un plan coordonné sur l’Intelligence Artificielle qui lui permettra de rivaliser avec la concurrence internationale pour le développement d’une IA “fabriquée en Europe”. 

Les États membres et le Parlement européen doivent se mettre d’accord le plus rapidement possible sur les propositions législatives concernant la cyber-sécurité, les données ouvertes et le prochain budget de l’UE, qui prévoit un financement pour la recherche et l’innovation, ainsi que le déploiement des technologies d’IA.

Page vidéo Transhumanisme et homme augmenté

Le transhumanisme est un mouvement culturel et intellectuel international prônant l’usage des sciences et des techniques afin d’améliorer les caractéristiques physiques et mentales des êtres humains. Le transhumanisme considère certains aspects de la condition humaine tels que le handicap, la souffrance, la maladie, le vieillissement ou la mort subie comme inutiles et indésirables. Dans cette optique, les penseurs transhumanistes comptent sur les biotechnologies et sur d’autres techniques émergentes. Les dangers que présentent de telles évolutions sont énormément préoccupants.

Interview exclusive par Ecomnews, de Christophe Habas, neuroradiologue et Grand Maître du Grand Orient de France de 2016 à 2018 venu à Montpellier donner une conférence sur le transhumanisme, à l’invitation de l’association « Les amis de Georges Frêche ». 

Le philosophe Bernard Stiegler émet de sérieux doutes quant à la philosophie transhumaniste récemment promue par les multinationales californiennes. Il nous livre en quatre points ce qu’il estime être les questions importantes que l’engouement tend à voiler. http://bits.arte.tv

Bernard Stiegler, à propos de la philosophie transhumaniste sur Arte, 2ème partie

Magazine Bits sur Arte, Bernard Stiegler et le transhumanisme, troisième partie

Bernard Stiegler sur Arte, magazine Bits, regard du philosophe sur le transhumanisme, quatrième et dernière partie. 

L’homme « augmenté » fait rêver… L’homme, débarrassé de ses faiblesses et lorgnant vers l’immortalité, est pour demain. A grand renfort de nanotechnologies, génétique et biotechnologies. Jacques Testart, notre invité est biologiste. Il est le père scientifique du premier bébé-éprouvette français. C’était en 1982. Aujourd’hui, il signe le livre « Au péril de l’humain – Les promesses suicidaires des transhumanistes » aux Éditions du Seuil. Un ouvrage de réflexions coécrit avec la journaliste Agnès Rousseaux, qui met en garde contre les transhumanistes et leurs Graal peu recommandable. Et si aux côtés de l’homme « augmenté » apparaissait le sous-homme ? Une partition peu souhaitable pour l’Humanité… Il nous fait part de ses reflexions sur le plateau du « 64 minutes le monde en français » sur TV5MONDE.

Futuremag sur Arte : Après un grave accident de montagne, l’ingénieur américain Hugh Herr s’est vu amputé des deux jambes. Depuis ce jour, il n’a qu’une seule idée en tête : rendre leur mobilité aux personnes handicapées. Fondateur du Centre de Bionique Extrême et professeur de biophysique, il travaille à la création de prothèses personnalisées munies de capteurs permettant d’adapter le mouvement à l’environnement du patient. Impressionnant !

Dans Polonium, sur Paris Première, Natacha Polony reçoit Luc Ferry pour revenir avec lui sur son dernier livre sur le transhumanisme. Allons-nous pouvoir vivre plus longtemps et en meilleure santé grâce aux progrès technologique et génétique ?

Université de Nantes : L’émergence des nouvelles technologies et les progrès réalisés dans de nombreux domaines (numérique, robotique, médecine…) ont révolutionné en quelques années notre vie quotidienne et le regard sur l’évolution de l’humanité. Aujourd’hui, des scientifiques développent des imprimantes 3D capables de construire tissus et organes humains, des informaticiens créent des langages de programmation qui modifient le comportement des cellules vivantes, des intelligences artificielles se mesurent avec succès avec des champions d’échecs ou de Go et des exosquelettes peuvent être contrôlés par la pensée. Les limites humaines, comme celles de la machine, semblent pouvoir être repoussées de jour en jour… Alors, à quoi ressembleront les êtres humains dans quelques dizaines d’années ? Jusqu’où nos limites physiques et intellectuelles seront-elles poussées ? Quelle place donnerons-nous aux machines ? Quelles questions éthiques se posent à nous et quel type de société voulons-nous construire ?

Humanité et Intelligence Artificielle Questions Philosophiques

Entre humanité et technosciences : questions philosophiques

Cet article, bien qu’il rejoigne pleinement mes convictions et mes interrogations, est plus un compte rendu qu’une production personnelle. Je l’ai écrit après avoir assisté à une conférence du philosophe Jean-Michel Besnier, consacrée au transhumanisme. J’y ai mêlé ses réflexions et les miennes et les partage aujourd’hui avec vous.

Quels idéaux, quelles valeurs, quelles croyances, sont-ils possibles quand on décide de mettre toute son énergie à vouloir toujours plus de technologies ?
C’est le contexte qui est aujourd’hui le nôtre. Nous sommes de plus en plus enclins à réclamer des techniques et des technologies. Ceci pose la question de notre avenir dans la mesure où on le subordonne de plus en plus aux réalisations techniques que les laboratoires et les organismes de recherche nous autorisent.
Quel avenir préparons-nous à l’humain ? Cette question n’a jamais été plus urgente. Et la science fiction n’est plus seule à la poser…
Depuis les technosciences, ce mixte de science et de technologie, nous pensons sérieusement les uns et les autres, que nous sommes en train de préparer une humanité nouvelle qui devra s’élargir à d’autres êtres que les hommes et les femmes que nous sommes. Nous sommes disposés à dire qu’il y aura sans doute parmi nous dans un avenir proche, des êtres qui résulteront de clonages… Il y aura peut être des mutants, des cyborgs, des robots androïdes. Et dans un avenir bien plus proche qu’on ne l’imagine. Bref, nous serons sans doute entourés d’êtres inédits qui nous obligeront à nous demander ce qui fait encore la spécificité de l’humain, ce qui garantit sa dignité. Donc que sera l’être humain dans un contexte où nous saurons le fabriquer et non plus le recevoir par hasard du fait de l’évolution naturelle, du fait de la naissance ?
Le jour où nous saurons réellement fabriquer l’humain, qu’est-ce que ça produira dans nos esprits et nos manières de penser ?

Vous vous souvenez sans doute de la question qui fût posée à Œdipe ? Quel est l’être qui marche tantôt à deux pattes, tantôt à trois, tantôt à quatre… ? et qui, contrairement à la loi générale, est le plus faible quand il a le plus de pattes ? Quand on pose cette question on oublie toujours cet ajout. En répondant l’homme, Œdipe s’est débarrassé du Sphinx tout en s’assurant le respect des habitants de Thèbes. Hé bien cette question qui appelait comme réponse « l’homme », est probablement ce qui a inauguré la tradition culturelle occidentale. Et sans aller dans le détail, Kant subordonnait tout son programme de philosophie à cette question : « qu’est-ce que l’homme » ? Il considérait qu’il y avait au fond trois grandes questions : Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? et une quatrième question devait chapeauter les trois premières : « qu’est-ce que l’homme » ?
La première question « Que puis-je savoir » correspondait à la métaphysique, la deuxième question « Que dois-je faire » correspondait à la morale et la troisième question : « que m’est-il permis d’espérer » correspondait à la religion et la quatrième « qu’est-ce que l’homme » à l’anthropologie. Et selon Kant on devait pouvoir ramener l’ensemble des questions que les humains se posent à l’anthropologie. C’était La question des questions. Et cette question des Questions, on peut facilement s’en convaincre aujourd’hui, elle reste notre question fondamentale… et peut-être même plus que jamais. Elle est encore irrésolue ; de l’aveu même des scientifiques, de ceux qui travaillent à ce qu’on appelle la convergence des disciplines. Ce sont des scientifiques qui aujourd’hui s’efforcent d’unifier le champ du savoir. Les physiciens cherchent à réunir les clés d’explication des relations que chacun des secteurs du savoir peuvent avoir entre eux. Et d’une façon générale, cette question « qu’est-ce que l’homme » agite énormément tous ceux qui mobilisent leurs compétences pour nous doter d’une maîtrise accrue sur le vivant.

Hé bien ces scientifiques, de leur aveu même, sont parfois pris de vertige, devant la puissance de déréalisation du réel, qui résulte de nos possibilités Techno – logiques.

Je vais l’expliquer de façon un peu plus claire. Au fond, comment savoir ce qu’est l’humain, à l’heure où les nano technologies, rendent possible la dématérialisation et la désidentification des objets ? Vous savez les nanotechnologies, c’est cette discipline qui travaille à l’échelle du un milliardième de mètre. Inutile de vous dire qu’on ne voit rien à cette échelle. Quand on touche l’un des microscopes hyper sophistiqués qui nous révèlent des aspérités, des atômes. On essaie de modifier la configuration des atômes pour produire de nouveaux objets, de nouveaux matériaux. Nous y reviendrons.

Mais comment savoir ce qu’est l’humain quand les nanotechnologies déploient leurs possibilités ? Comment savoir ce qu’est l’humain quand les biotechnologies et la biologie de synthèse nous permettent de transgresser les limites naturelles et d’hybrider par exemple, le vivant et l’électronique ? La biologie de synthèse est engagée sur ce travail là.
Comment savoir ce qu’est l’humain, quand les sciences cognitives conduisent à définir l’intelligence sans plus avoir besoin de recourir à la conscience ? Vous savez les sciences cognitives c’est cette nébuleuse de disciplines qui cherchent à répondre à la question « qu’est-ce c’est d’être intelligent » ? A quoi reconnaît-on l’intelligence ? Peut-on simuler de l’intelligence ? Y a-t-il de l’intelligence chez les animaux ? Des machines peuvent-elles être intelligentes ?
De ce fait les sciences cognitives dissocient de plus en plus l’intelligence de la conscience. On peut être intelligent sans avoir de conscience. On peut prêter de l’intelligence à une amibe… donc sans avoir besoin de recourir à la conscience, dont on sait de moins en moins ce que c’est. Comment définir l’humain dans cette situation là ?
Comment savoir ce qu’est l’humain quand les technologies de l’information font triompher le flux des communications, ce flux qui dissout de plus en plus les substances, les identités etc. C’est une vraie question. Et j’ai énuméré là quatre disciplines : nanotechnologies, biotechnologies, biologie de synthèse, sciences cognitives et technologies de l’information.

Ces disciplines sont impliquées aujourd’hui dans un fameux programme américain, très connu sous l’acronyme suivant : NBIC – Nanotechnologies, Biotechnologies Sciences de l’Information et Sciences Cognitives.

Ce programme américain résume à sa façon toutes les perplexités qui sont les nôtres aujourd’hui concernant la définition de l’homme. Et ce programme de 400 pages qu’on trouve sur internet est précédé d’un manifeste qui sert de vade-mecum à la démarche transhumaniste. Toutes les politiques de recherche des pays développés, s’inspirent de ce manifeste et de ce rapport NBIC. Ce rapport s’ouvre donc sur un manifeste qui déclare ave une certaine emphase, que nous sommes à la veille d’une renaissance. La renaissance est la maître mot de ce manifeste ; qui prétend par conséquent nous déployer l’avenir, en déclinant toutes les réalisations qui sont promises aujourd’hui par les différentes sciences et techniques qui convergent dans le projet NBIC.

En science-fiction on a aujourd’hui toutes les raisons du monde de vouloir mettre en situation les complexités qui sont nourries par les sciences contemporaines. Je crois que la science-fiction on le constate tous, a changé complètement de statut. Aujourd’hui elle est rentrée dans notre quotidien. Elle sert quelquefois de prétexte à la formulation de projets de recherche des grands laboratoires. Il y a une sollicitation des auteurs de SF pour permettre aux scientifiques dûement diplomés d’extrapoler les scenarios de recherche. Plus que jamais la SF nous pose la question : « qui est ENCORE l’humain AUJOURD’HUI » ?

Est-ce le mutant baptisé « replicant » dans le film Blade Runner ? C’est l’histoire d’un mutant qui découvre l’univers des émotions que les humains ont largement perdu. Qui est le mutant : le replicant qui découvre l’espace émotionnel ou les humains qui en ont perdu le sens ? Et l’enfant robot de « Intelligence Artificielle » de Steven Spielberg, ce petit robot qui réclame l’amour d’une mère. Est-ce qu’il n’est pas plus humain que ceux qui dans le même film, détruisent les androïdes ? De même pour Avatar, ce film de James Cameron où ces êtres qui défendent leur planète Pandora, sont finalement bien plus conformes que les humains à l’idée qu’on peut se faire de ce qu’est être humain.

La leçon de ces films de science fiction c’est qu’ils génèrent un imaginaire très présent. La leçon est toujours très naïve dans ces films, mais elle a le mérite d’être constante. Finalement le message c’est : avant d’être dans les attributs morpho-biologiques, 

l’humanité consiste peut-être en des qualités de cœur, qui dépassent la possession de ces attributs. On prépare à projeter sur des êtres qui ne sont pas des humains, des sentiments proprement humains qui nous désertent peut-être nous, humains.

A cet égard il faudrait peut-être être prêts à accueillir dans l’humanité ces êtres que fabriqueront nos technologies. Et peut être faudrait-il les imiter s’ils nous semblent le mériter. C’est un peu l’esprit d’une série suédoise que vous avez peut-être vue : « we are humans ». Cette série pose la question : « où sont les vrais humains » dans un monde qui s’est laissé coloniser par les robots ? Mais ce que révèle la science fiction c’est que la question « qu’est-ce qu’être humain » ? a pris de nos jours un relief particulier et même une tournure dramatique, qui suggère ceci : on se demande en fait si l’humain n’est pas en train de disparaître dans sa dimension à la fois biologique et psychique du fait des technologies qui entreprennent de le réinventer, voire même de lui trouver un substitut. La question est donc devenue urgente parce que on a le sentiment que sur le terrain biologique et psychique nous sommes en train de perdre certains repères qui jusqu’à présent nous assuraient que nous savions ce que c’est qu’être humain.

Or aujourd’hui les technologies réinventent l’homme et c’est finalement cela le défi nous lance le transhumanisme. Les outils qui nous ont permis de développer progressivement une pensée conceptuelle, vont nous isoler de cette pensée pour nous enfermer peu à peu si nous n’y prenons pas garde, dans une prison qui mêlera nos sens avec la technologie. Et ce contrôle électronique, cette augmentation de nos capacités tant physiques que cérébrales nous privera progressivement de notre plus grand trésor : la capacité à penser et agir en autonomie et en liberté.